dimanche 22 juillet 2012

Reugny : L'Eglise

En 1555, les propriétaires du château de la Côte font graver une plaque pour commémorer leurs fondations de messes et leurs donations. En voici un extrait : "Perrine le Fuzelier, dame de la Couste, a fondé une messe du Sainct-Esprit chacun jour de vendredi en l'église de céans. Marc de la Rue, seigneur de la Couste, son filz, a fondé une offerte de dix déniers et d'une chandelle de cire de la valeur de deux déniers et l'aumosne de douze déniers au paoure présentant ladicte offerte, laquelle et ladite offerte se doibvent faire par chacun dimanche et jour du jeudi absolu ; auxquelz jours se doibvent dire l'oraison et paroles ordonnez pour la recommandation et mémoire dudict de la Rue, et est ledict paoure tenu assister aux processions desdictz jours et des jours de la feste du Saint-Sacrement et des octaves d'icelle, marcher tenant la croix, revestu d'une écharpe et porter une verge blanche en la main droite [...] Ont été passées lettres entre ledict sieur fondateur et lesdicts curés et procureurs de ladite église, du consentement des autres paroissiens, par Jeahan Gaitier et Françoys de Cestes, notaires en la Cour de Reugny, le dimanche 22e de décembre l'an 1555, lesquelles ont été faites quadruples et baillées une audict sieur fondateur, la deuxième auxdits procureurs, qui sont tenus gardés au coffre de ladicte fondation, la 3e au curé, la 4e au notaire ordinaire pour la conservation et contenement d'icelle... et de leurs droicts". Cette traduction est tirée d'une promenade archéologique de l'abbé Bourassé, publiée dans les Mémoires de la Société archéologique de Touraine en 1842. Vous pouvez voir la transcription en entier en cliquant ici : Gallica.
La statue de la Vierge au manteau bleu date du XVIe siècle et a été fabriquée en Italie.
Dans la chapelle de la Vallière, on peut lire un texte en vieux français :"Laurent Le Blanc, escuyer de la Gasseyre, estait en Flandre, au siège d'Ostende. Y mourut le XV de mars 1602. Ses frères, à son intention ont fondé céans une messe chacun an le jour de son décedz. Il y a contract, passé par Galler, notaire royal à Ruigny, le XV mars 1603". Il s'agit du frère du grand-père de Louise de la Vallière.
La chapelle de la Côte a deux travées couvertes d'un berceau de bois, orné de peintures dans la travée orientale.
Cette voûte montre trois écussons. Au centre : coupé de gueules et d'or, au lion léopardé coupé d'argent et de gueules, qui est de la Baume le Blanc.
Vers le choeur, en losange, parti au premier de la Baume le Blanc, au deuxième d'argent, à quatre lions de gueules cantonnés, armés, lampassés et couronnés d'or, qui est de Beauvau.
Vers l'intérieur, en losange, écartelé, au premier et quatrième de la Baume le Blanc, au troisième d'azur, à un triangle d'or, chargé de quatre coquilles d'argent, qui est Adam de la Gasserie (parents de Jean de la Baume le Blanc).
Cette décoration a été exécutée pour Jean de la Baume le Blanc à l'occasion de son mariage avec Françoise de Bauveau, en 1609. Ce sont les grand-parents de Louise de la Vallière.
Sous la chapelle de la Vallière, le seigneur de la Vallière fait faire au XVIIe siècle une cave pour sa sépulture et celles de ses successeurs.
Elle porte ses armoiries.
En février 1650, Louise de la Vallière est marraine pour la première fois à Reugny ; elle signe l'acte de baptême d'une écriture mal assurée, sans doute guidée par une main adulte.
Le 11 août 1651, à sept ans, elle couche pour la deuxième fois sa signature sur le registre paroissial de Reugny, à l'occasion du baptême d'un autre enfant du pays. Son frère, Jean-François de la Baume Le Blanc est le parrain de cette petite fille.
Françoise Le Provost, mère de Louise de la Vallière et veuve de Laurent de la Baume le Blanc qu'elle avait épousé en 1640, se remarie en 1655 avec Jacques de Courtavel, veuf et père d'une fille de l'âge de Louise : "Le 2e jour de mars 1655, furent espousez en la chapelle de la Vallière, paroisse de Reugny, par dispense de Monseigneur l'illustrissime et révérendissime Victor le Bouteiller, archevêque de Tours, Messire Jacques de Courtavel, seigneur de saint Rémy, Boisrembour et autres terres, premier maistre d'hotel de Madame Duchesse d'Orléans, et Dame Françoise Le Provost, veuve de Messire Laurent de la Baume le Blanc, chevalier seigneur de la Vallière et autres terres, baron de la Maisonfort, lieutenant pour le Roy au gouvernement d'Amboise, Capitaine lieutenant de la mestre de camp de la cavallerie légère de France et premier capitaine major du régiment de Gassion ; en présence de leurs plus proches et de plusieurs tesmoins et de nous curé soubssigné".
Le 4 juin 1702, les villageois "assemblez à la manière accoutumée" à la fin de la messe dominicale prennent le parti de leur curé Pierre Lhéritier contre les "sieurs Dubois, ennemis capitaux dudit sieur curé pour lui faire chagrin et vexation en haine de ce qu'il s'est opposé à l'emplacement d'un banc que les dits sieurs Dubois voulaient mettre dans le choeur de son Eglise...".
1706 : Le curé Lhéritier fait faire un choeur à quatre sièges...
"Le quinzième d'Août 1715 fut baptisée la cloche de cette Eglise par nous curé soussigné et nommée Médard par Messire Charles François de la Baume le Blanc, seigneur de la Vallière [...] Il faut remarquer que le sieur Jacques Dubois, commissaire des guerres, avait été choisi par Antoinette Dassé, sa femme, par l'absence de Monseigneur de la Vallière et que Mr. de Foleuile, par ordre de Mr de la  Vallière, fit biffer les noms du sieur Dubois et de sa femme qui avaient été mis sur la présente cloche le jour et ans que dessus."
"Cette mesme année 1715, Monsieur le marquis de la Vallière donna une de ses couleuvrines qui avait crevé et emporté la jambe de Lambert et le ventre de Dubois sur la terrasse de la Vallière dont le dit Dubois mourut et le dit Lambert vivant, laquelle couleuvrine fut meslée au métal de la cloche et cinquante livres que donna mondit seigneur de la Vallière. C'est pourquoi on apposa ses armes desus. Quoy qu'il en soit cette cloche appartient de plain droit aux habitants. Ce sont les offrandes de tout le public qui les donna touttes les deux en 1410 selon l'écrit qui estait lors de leur fonte et de notre tems..."
Le 31 décembre 1718 "fut fondue la petite cloche et nommée Barbe, comme était la précédente qui fut fondue en 1408, laquelle nouvelle cloche fut bénite par nous curé de Reugny soussigné [...] que nous avons mis sur le timbre de l'horloge [...] et mis à sonner les heures au dessus de la grande porte de l'église".
L'autel, placé contre le mur de la chapelle de la Vallière où s'ouvrait la sacristie détruite, date du XVIIIe siècle.
L'autel de la chapelle de la Côte est l'ancien maître-autel, et date du XVIIIe siècle.
Des panneaux peints qui se trouvent aujourd'hui dans la sacristie, peuvent dater du XVIIIe ou XIXe siècle.



Une cuvette d’étain pour les fonds baptismaux et un petit vase pour les baptêmes sont ajoutés en 1768.
Le curé Michau consigne cet évènement dans son registre paroissial : "Le vingt six juin mil sept cent quatre vingt douze en décarelant la chapelle de la Vallière, on a levé une pierre dure d'environ trente pouces en quaré fermant l'entrée d'un caveau bien vouté,
un escalier en pierre pour y descendre,
dans lequel caveau est un cerceuil en plomb mangé par le sel, et sur icelui une plaque de cuivre rongé sur laquelle sont gravés ces mots : icy repose Me Laurent de la Beaume le Blanc, chevallier seigneur des Chatellenies de la Vallière et Reugny, baron de la Maisonfort, gouverneur pour le roy des ville et chateau d'Amboise, mestre de camp de la cavallerie légère, décédé le vingt un septembre mil six cent cinquante un. Resquiescat in pace". Il s'agit du père de Louise de la Vallière. La plaque est remplacée en 1832 par Mme la duchesse d'Uzès, son arrière petite nièce. Il y est écrit : "Restes de Messire Le Blanc Laurent la Beaume, Ecuyer de la Gasserie, mort au siège d'Ostende en 1602, recueillis par Madame Amable Emelie de Chatillon Duchesse d'Uzès, son arrière petite nièce, 1832."
On peut donc penser que le corps de Laurent de la Baume le Blanc a été jeté dans la fosse commune à la Révolution, avant d'être remplacé quarante ans plus tard par celui de son oncle Laurent le Blanc, mort en 1602 au siège d'Ostende .
En 1792 le pignon ouest menace de tomber et le carrelage et la charpente sont délabrés. Le curé, agriculteur à Bel-Air, se plaint à cette époque de la vétusté des murs du cimetière.

Sources : 
- Louis Tricot
- G. Braux
- Archives départementales d'Indre et Loire ("En touraine, je me souviens")
- Collectif, Le patrimoine des communes d'Indre et Loire, éditions Flohic

4 commentaires:

  1. Félicitation pour toutes ces recherches, c'est fantastique de s'intéresser ainsi à toute l'histoire de son village. Nous avons beaucoup de choses à apprendre, même si on vit dans le secteur depuis longtemps! Je vais prendre le temps de tout regarder car c'est vraiment très agréable...
    Marie

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  2. Bonjour Guillaume, merci pour toutes ces nouvelles informations sur l'église de Reugny. Lorsque j'étais encore enfant, des personnes disaient qu'un tunnel partait du Château et rejoignait l'église, probablement une légende ou de l'imagination.
    A bientôt sur votre site
    Cordialement
    Mme Renou

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  3. Salut Guillaume, je trouve cette page sur l'histoire de l'église de Reugny fort instructive. L'une des photos de la dépouille reposant dans la crypte laisse clairement entrevoir que le crâne a été visiblement ouvert sur sa partie supérieure. Cela est un indice qui pourrait peut-être aider à identifier plus précisément le nom du défunt en question et ainsi lever le doute.

    Mikka

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    1. Au contraire, c'était une pratique courante à l'époque de conserver les cerveaux (que pour les nobles bien sûr)...

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