mardi 27 août 2013

La ligne de chemin de fer Tours-Sargé

En 1863, une pétition est déposée en mairie de Reugny pour que la ligne Tours-Sargé passe par la vallée de la Brenne.
En 1881, lors du choix du tracé par le Conseil Général la "commission est d'avis que la halte de Neuillé le Lierre devra être remplacée par une station ouverte aux marchandises, qui est réclamée à bons droits par les habitants de cette commune. Les communes limitrophes de Montreuil et d'Autrèche en tireraient profit pour l'expédition de leurs vins et céréales."
La section Vouvray-Château Renault est inaugurée le 29 juillet 1894. Toutes les gares de cette ligne sont construites sur le même modèle, mais toutes n'ont pas conservé l'ensemble de leurs bâtiments.
La ligne partait de Tours, suivait la ligne Tours-Blois jusqu'à Vouvray, et la quittait juste après le pont de Montlouis. Elle traversait la Cisse sur un très beau pont, dont la photo datant du mois d'août 2013 le montre en restauration,
et traversait deux fois la Brenne à Vernou, sur l'emplacement de l'actuelle départementale.
Avant la gare de Chançay, on remarque un château d'eau, cela s'explique par le fait que la locomotive à vapeur consommait une quantité importante d'eau.
L'eau était pompée dans la Brenne par une pompe
qui se trouvait dans ce bâtiment.
La ligne arrivait ensuite à la gare de Chançay, puis elle continuait à Reugny, Neuillé le Lierre, Villedômer, Château-Renault... jusqu'à Sargé.
Sur les communes de Reugny et Neuillé, il reste : un petit bâtiment servant de W.C. et de lampisterie à Neuillé (c'était le local où étaient préparées et entreposées les lanternes à pétrole, notamment celles qui étaient accrochées sur l'avant des locomotives),
les deux "bâtiments voyageurs"
(plan du rez-de-chaussée),
trois maisons de garde barrière,
et les deux halles à marchandises (qui ont été très dénaturées).
Chaque gare possède son nivellement,
et même les poignées de portes sont estampillées "ST" (Sargé-Tours).
De nombreux ouvrages d'art ont dû être construits, les photos qui suivent ont toutes été prises à Neuillé...
et à Reugny...
Il existe également des constructions parallèles comme l'hôtel de la gare, devenu dans les années 1950 l'Auberge de la Brenne,
et des ponts pour accéder à la gare.
La ligne s'est trouvée coupée à deux reprises à cause des inondations de la Loire et de la Cisse, la première fois en mars 1895, moins d'un an après sa mise en service, et la deuxième fois en octobre 1907.
La construction de la ligne de chemin de fer a aussi été l'objet de discussions. Certaines personnes n'y voyaient aucune utilité. C'est le cas de M. Boutard, habitant Neuillé. Pour prouver l'inutilité de cette ligne il décide de partir en même temps que la locomotive, sur son grand bi, pour voir lequel arriverait le premier.
Photo de Wikipédia
Lorsque le train est arrivé en gare de Saint-Pierre des Corps 45 minutes plus tard, M. Boutard était déjà là !
Voici les horaires pour l'année 1907-1908 :
En 1908, "le Conseil avait émis le vœu que l'ancien train 962 partant de Tours à 6 h. 3. du matin et se dirigeant sur Sargé fût rétabli pour assurer le service postal du matin dans les communes de la vallée de la Brenne, où ce service est complètement désorganisé depuis l'horaire du 1er juillet dernier [1907] ; le premier courrier n'étant plus distribué dans ces communes qu'entre 10 heures du matin et midi. Ce vœu a été transmis par les bons soins de M. le préfet, ainsi que les protestations des conseils municipaux intéressés. Une pétition couverte par environ 1.300 signatures des habitants de Chançay, Reugny, Neuillé-le-Lierre, Villedômer, Crotelles, a été également transmise à M. le Ministre des Travaux publics par M. le Préfet à la date du 18 janvier dernier.[...] M. Foy s'associe aux conclusions de ce rapport. Il proteste contre la façon dont l'Administration supérieure, depuis 7 à 8 mois, a désorganisé le service postal dans les communes de la vallée de la Brenne. Et qu'on ne vienne pas dire que cette désorganisation est due à ce fait que l'heure d'arrivée du train postal a été modifiée sur la demande du Conseil Général. Le Conseil Général, quand il demande la modification d'un horaire, ne peut pas toujours savoir la répercussion que cette modification d'horaire aura sur tel ou tel service. Il appartient à l'Administration supérieure de l'en informer. L'orateur interviendra à nouveau auprès du Ministre des Travaux publics afin que, dans le plus bref délai possible, le service soit rétabli comme il l'était autrefois."
Pendant la Première Guerre Mondiale, au moins un train de blessés s'est arrêté sur la ligne, comme nous l'apprend une carte, envoyée de l'hôpital de Vatan, dans l'Indre, au maire de Reugny en mai 1918 : "Recevez Monsieur le Maire au nom de tous mes Camarades blessés du train sanitaire passé dans votre commune le 26 avril une reconnaissance des bons souvenirs de bontés de tous vos administrés".
Le 27 décembre 1934, "un train de marchandises venant de Châteaurenault a tamponné au passage à niveau de Chançay une auto conduite par M. Emile Grobois, 35 ans, boulanger. L'auto a été traînée sur une grande distance et on a retiré des débris le conducteur mortellement blessé."
En 1936, une demande est envoyée au conseil général afin de prolonger jusqu'à Reugny la ligne de bus Tours-Vernou. La réponse donnée par la préfecture fut : "Le prolongement jusqu'à Reugny du service automobile Tours-Vernou qui concurrençait le chemin de fer de l'Etat serait en contradiction avec les dispositions de l'article 5 du décret-loi du 19 avril 1934 sur la coordination des transports ferroviaires et routiers portant interdiction de créer de nouveaux services. Mais afin d'améliorer les relations du matin avec Tours, le réseau de l'Etat se propose de modifier prochainement la marche du train 2741, qui arriverait à Tours vers 9 h. 25 au lieu de 11 h. 4."
Le service voyageurs prit fin le 2 octobre 1938, et il y circula des trains de marchandises pendant encore quelques années.
En février 1940, le conseil municipal de Reugny "renouvelle ses protestations contre le service des cars ; Les retards atteignent des délais invraisemblables entraînant de longues attentes du public dans des conditions défavorables. La fréquence des pannes et telle que les arrivées deviennent normalement incertaines. Les voitures circulent toujours avec des surcharges qui rendent certainement dangereux ce mode de transport. Il y a unanimité pour réclamer la remise en service du tronçon de voie ferrée Châteaurenault-Tours par Reugny, comme cela a été fait pour la section Blois-Pont de Braye."
Pendant la seconde Guerre Mondiale, la ligne était très utilisée par les allemands.

Depuis 2014, une piste cyclable, la Voie Verte, emprunte le parcours d'une partie de la ligne. Elle permet de relier Reugny à Tours.

Sources : 
- Registres de délibérations de la Mairie de Reugny.
- Rapports et délibérations du Conseil Général d'Indre et Loire (1881 - 1908 - 1936).
- Archives départementales d'Indre et Loire (E dépôt 194 Ø9 ; E dépôt 194 Q9).
- Petit guide contenant la marche des trains, Les renseignements généraux sur le département d'Indre-et-Loire, Et l'indicateur des rues et places de la ville de Tours, Offert par le Grand Bazar et Nouvelles Galeries, Hiver 1907-1908.
- L'ouest-Eclair (28/12/1934).
- M. Schubert et M. Foussard.

17 commentaires:

  1. Du texte et des photos. Tout ce que j'aime !
    C'est fouillé et clair. Merci.

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  2. tu sais que tu as fait un reportage....qui pourrait interesser la SNCF!!! C'est remarquable Guillaume! Bravo!
    Bises

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  3. Effectivement, voilà une étude très complète et bien imagée. De l'excellent travail qui s'avère, en plus, intéressant !

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  4. Ma grand mère m à dit que le train était surnommé "le pain sec"

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    1. Pas celui-ci. C'était une ligne qui passait par Monthodon je crois.

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    2. Oui, c'était la ligne Château-Renault Port-Boulet (Chouzé-sur-Loire).

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  5. Très bon travail, mais j'aimerais trouver le tracé complet de cette ligne. Surtout sur vernou car j'arrive pas a déterminer le tracé entre vernou et chançay

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    1. C'est très simple : c'est la départementale, à Vernou, les deux ponts traversés sont les ponts de l'ancienne ligne.

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  6. bonjour

    merci pour votre travail. Connaitriez vous la date de fermeture de cette voie ?
    merci

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  7. François SERRE-BLANQUART15 juillet 2014 à 23:23

    La ligne a été fermée tronçon par tronçon
    Fermeture aux marchandises :
    Sargé-sur-Braye - Montoire-sur-le-Loir : 31/07/1942
    Montoire-sur-le-Loir - Saint-Arnoult : 18/05/1952
    Saint-Arnoult - Authon-Monthodon : 23/05/1954
    Châteaurenault - Vouvray : 03/07/1972
    Authon-Monthodon - Châteaurenault : 24/09/1989

    La dépose des voies et le declassement est survenu plus tard ..
    Déclassement :
    Sargé-sur-Braye - Authon (57,502 - 77,260) : 12/11/1954
    Villedômer - Reugny (48,200 - 56,700) : 28/03/1972
    Reugny - Vouvray (56,700 - 68,430) : 24/02/1975
    Authon-Monthodon - Châteaurenault (36,620 - 43,835) : 16/12/1991
    Châteaurenault - Villedômer (45,820 - 48,200) : 17/10/1994
    Je me rappelle bien le train du matin et le train du soir quand j'étais enfant à Vernou ...Et à chaque fois que je roule sur cette departementale de Vernou vers Chancay ..je me souviens avoir fait la même chose il y a bien des années à vélo sur le petit chemin de coté du ballast
    Et il me semble que ce ballast avait été prélevé dans ce grand trou qui s'appelait la Fosse de l'Emprunt ..maintenant comblée (avec les restes de l'excavation dans le coteau de la ligne TGV) et sur laquelle se trouve maintenant la dechetterie vernadienne de la communauté de communes .

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  8. Tiens, j'aurais dû (re)lire ce billet avant de partir en vadrouille samedi ;-) Sinon tu devrais mettre quelques photos et un lien vers le billet de la balade sur la fameuse voie verte...

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  9. Super, je pars de ce pas voir tout ça de plus prés

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