mardi 13 août 2013

Chançay : Le Château de Valmer

En 1810, Thomas de Chabrefy est propriétaire de Valmer. Il sera maire de Chançay de 1815 à 1823.
Dans les années 1830, le château de Chanteloup à Amboise est acheté par un des démolisseurs de la "Bande noire" (à qui l'on doit également la destruction du château de Richelieu). Il vendit pierre par pierre le château, l'éparpillant dans toute la Touraine (par exemple à Tours). C'est donc à cette occasion que le propriétaire de Valmer pu acheter les quatre colonnes qui sont disséminées dans le parc.
Ces quatre colonnes proviennent du péristyle du château de Chanteloup.
Elles sont surmontées de vases provenant également de Chanteloup.
Dans le parc on remarque deux fabriques du 19e siècle : le Vide-bouteille,
et le Belvédère, qui possède un escalier menant à une petite plate-forme, et qui devait servir à surveiller les chasses.
Le château de Valmer est restauré tout au long du 19e siècle. En juin 1847, récent héritier et jeune marié depuis trois ans, Jérôme-Charles Valleteau de Chabrefy se résolut à mettre au goût du jour et à moderniser le château qu'il avait déjà décoré de divers souvenirs, en particulier des armes anciennes rapportées lors de ses voyages en Orient et la création d'un "salon japonais", par l'architecte Duban.
En 1856, l'architecte Jules de la Morandière ajoute notamment une cuisine entre le château et le coteau,
il refait toute la façade, mais pas à l'identique :
En comparant cette photo avec le dessin de 1695, on remarque d'importantes modifications : les fenêtres de la Renaissance sont refaites et surmontées de coquilles surdimensionnées, il supprime les meneaux, le porche d'entrée est supprimé, la porte est refaite...
Et il refait l'intérieur du château, en ajoutant par exemple une cheminée bizarre, peut-être faite de morceaux d'une ancienne cheminée...
En 1888, la famille Valleteau de Chabrefy vend le château aux Lefèvre.
En 1889, Paul Lefèvre convoque l'architecte tourangeau Léon Brey pour terminer la décoration extérieure du château. La façade nord, qui n'avait pas encore été touchée et présentait toujours son aspect Louis XIII d'origine est refaite :
il supprime le fronton, perce la toiture de quatre grandes lucarnes néo-Renaissance copiées sur celles du château de la Côte et ajoute des meneaux aux fenêtres.
Il refait également la partie ajoutée par Jules de la Morandière en remplaçant le premier étage par une loggia
Les communs aussi sont modifiés et agrandis avec notamment la construction de ces bâtiments.
Vers 1890-1900, M. Lefèvre fait redécorer la chapelle : sa porte d'entrée est surmontée d'un tympan de style Troubadour ou néo-gothique, et il commande à un maître-verrier de Tours des bordures pour encadrer deux vitraux du XVIe siècle qu'il venait d'acquérir chez un antiquaire.
En 1930, "le château et ses dépendances comprenant le pavillon Louis XIII, les terrasses et la chapelle creusée dans le rocher avec son autel" sont inscrits aux Monuments Historiques.
Le 31 juillet 1933, le comte de Saint-Venant publie une annonce dans le journal L'ouest-éclair : "donnerais en métayage à famille catholique, 1er novembre 1934, exploitation très prospère près Tours, 45 hect. terres, 15 près, 15 vaches."
Le château est détruit par un incendie le 20 octobre 1948. L'article de la Nouvelle République : "à environ 23 heures, le comte de Saint-Venant eut son attention attirée par de la fumée venant de la chambre d'une femme de ménage, sous les combles. La porte étant fermée à clé, un appel d'air se produisit qui aviva l'intensité des flammes. L'alarme fut aussitôt donnée et le personnel, comme toute la famille endormie dans le château, purent être évacués en temps utile. Il fallut toutefois attendre l'arrivée des pompiers de Tours, sous les ordres du commandant Gauthier et des lieutenants Baudoin et Rousselet, suivis par ceux de Vouvray commandés par le lieutenant Pesseau et le petite brigade des pompiers de Chançay du lieutenant Mordelet mais, à leur arrivée, le sinistre avait pris de telles proportions que la grande échelle qu'ils avaient apportée fut inefficace : il n'y eut bientôt plus que des murs noircis... Une grande lance fut cependant mise en batterie dans l'escalier principal de même que six petites lances alimentées par l'un des bassins du parc furent également dirigées sur le brasier. Hélas, malgré tous leurs efforts, les pompiers furent incapables d'enrayer l'incendie. Au cours de toute la journée du lendemain, les hommes ne purent que seulement noyer les décombres fumantes. Dès qu'il en eut connaissance, M. Buchet, chef de cabinet de M. le Préfet, s'est rendu sur les lieux. Une enquête est ouverte, pour définir les causes de cet incendie."
Impuissant devant un tel spectacle (il s'était surtout préoccupé de la sauvegarde des habitants du château et, en particulier, de sa belle-mère Mme Lefèvre qui ne voulait pas quitter les lieux malgré les flammes de toutes parts) "le comte de Saint-Venant nous parla de sa demeure dont il contemplait les tristes restes en nous précisant que c'est à plusieurs centaines de millions que l'on peut estimer les ravages".
L'enquête ouverte par la gendarmerie ne mit que trois jours pour conclure à la cause accidentelle : Une employée du château était partie le matin visiter sa famille en laissant branché le fer à repasser qu'elle venait d'utiliser. L'électricité étant coupée pour la journée, elle n'avait donc pas d'inquiétude et comptait revenir à Valmer le soir même, au moment de la reprise du courant. La malchance fit qu'elle manqua son autobus de retour : quand l'électricité fut rétablie en fin d'après-midi, le fer à repasser se mit donc à chauffer...
Venu sur les lieux trois semaines après le sinistre, l'inspecteur des Monuments Historiques ne put que constater que "le seul élément pouvant être conservé est la loggia, partie qui a le moins souffert mais dont l'architecture ne semble pas de nature à retenir l'attention".
La liste est longue de tout ce qui disparut dans cet incendie. Sur la photo suivante : la bibliothèque, ornée de tapisseries des Fables d'Esope, et d'une cheminée qui sera épargnée par l'incendie et qui ira décorer un manoir en Normandie.
Et le grand salon, orné d'un plafond attribué au peintre Le Moyne,
et où se trouvait une harpe qu'aurait tenue Marie-Antoinette.
Mme Lefèvre ne survécut pas à l'anéantissement de trente-cinq ans de patientes restaurations : elle mourut en effet quatre mois plus tard, le 9 mars 1949, laissant la propriété à sa fille, la comtesse Barré de Saint-Venant.
Finalement, le célèbre architecte tourangeau Maurice Boille remit en état l'aile basse des cuisines (dont l'intérieur a été réaménagé il y a quelques années, et qui peut être louée).
On y réutilisa en guise de cheminée un linteau sculpté d'une tête de cerf provenant d'une porte d'entrée du château et datant de la restauration de 1889,

Une cheminée du 18e sera, elle, installée au château de la Côte.
En septembre 1967, le comte de Saint-Venant demanda l'autorisation de raser les ruines du château, ce que l'inspecteur des Monuments Historiques accepta après avoir lui aussi constaté que "rien d'intéressant ne peut être sauvegardé, l'ensemble de ce château ayant été très remanié au XIXe siècle". Les ruines sont rasées en août 1968. De nos jours, l'emplacement des murs du château est reproduit par des ifs taillés.
Sources :  http://www.chateaudevalmer.com/La Touraine Archéologique (Ranjard), La Loire tourangelle (Georges Collon), Rivières tourangelles : La Brenne (SERIA), Base Mérimée, J. Vacquier, Société archéologique de Touraine (2001).

2 commentaires:

  1. Bonjour,
    décidément l'on trouve tout sur le Web... Madame Lefèvre était ma marraine... Peu de temps puisque je suis né en 1948, un 20 janvier. Elle avait un surnom: "Grand-Mère Loup" (Rudyard Kipling), car elle fut très impliquée dans les scouts de France. Mon père vécut au château... Je possède encore aujourd'hui, après le décès de ce dernier, l'inventaire du château (le Grand Valmer). C'est impressionnant !
    Beau travail qui suppose de fortes motivations.
    Cordialement,

    François GIRAULT

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